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On a échappé à un fervent pélerinage religieux en Antarctique.
Publie le vendredi 14 novembre 2014 par Open-PublishingGrâce à la science, on a échappé à un fervent pélerinage religieux en Antarctique. En effet, une impressionnante coulée de liquide rouge sang s’écoule d’un glacier. Il n’y a pas si longtemps, il est à peu près certain que l’église ou quelques illuminés se seraient emparés du phénomène pour mobiliser force foules. Cela dit, les miracles ou apparitions se passent toujours dans des lieux fréquentés et plutôt bien accessibles et/ou déservis.
La foi se doit malgré tout d’être pratico-pratique.
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Une poche d’eau de mer, piégée depuis 1,5 million d’années en Antarctique, sous le glacier Taylor (près de la terre Victoria), vient de livrer un secret fascinant. Cette masse d’eau, d’une température moyenne de -10°C, ne reçoit jamais la lumière du jour, est dépourvue d’oxygène et apparaît chargée en sel, en fer et en sulfates. Régulièrement, des écoulements d’eau rougie provenant des profondeurs du glacier suggèrent la présence d’algues rouges, hypothèse à laquelle s’étaient ralliés les premiers scientifiques ayant exploré la région. Mais l’absence de sulfures, qui auraient dû provenir de la métabolisation du soufre par les micro-organismes, avait cependant infirmé cette théorie.
Plus récemment, la géomicrobiologiste Jill Mikucki, de l’université de Harvard à Cambridge, et ses collègues ont prélevé un échantillon de ces effluents rouges. Une analyse génétique des populations de bactéries a montré qu’elles sont proches d’espèces qui, pour la respiration, exploitent les sulfates plutôt que l’oxygène. Cependant, le dosage des isotopes d’oxygène, montrent, selon les auteurs, que ces bactéries antarctiques n’utilisent pas les sulfates directement pour respirer. Enfin, l’eau de mer prélevée semble anormalement riche en fer ferreux (Fe2+). Cet excès proviendrait des bactéries elles-mêmes, qui transformeraient le fer ferrique (Fe3+), qui est insoluble, en fer ferreux. Conclusion des biologistes : les bactéries se serviraient des sulfates comme catalyseurs pour, littéralement, respirer du fer, lequel jouerait donc le rôle de l’oxygène.
Le glacier Taylor emprisonne une réserve d’eau salée sous 400 mètres de glace, la privant de lumière et d’oxygène... et la protégeant de la visite des chercheurs. Mais des effluents, couleur rouge sang, provenant de cette baignoire isolée, diffusent à l’intérieur de la glace et se déversent sur la banquise recouvrant le lac Bonney. Dans ces effluents, des biologistes ont découvert des traces d’activité bactérienne, démontrant que des micro-organismes vivent depuis au moins 1,5 million d’années dans cette poche d’eau et sont adaptés à ce curieux environnement. (Cliquer sur l’image pour l’agrandir.)
Une piste pour l’origine de la vie, pas seulement sur Terre
« Lorsque j’ai commencé à analyser cette eau qui n’avait jamais vu le jour depuis un million d’années au moins, il n’y avait aucune trace d’oxygène. J’ai crié Eureka lorsque j’ai effectué cette découverte », se souvient Jill Mikucki.
Il est actuellement impossible d’évaluer la quantité d’eau renfermée dans cette poche sous la glace, mais sa profondeur est estimée à 400 mètres tandis qu’elle se trouverait à 4 kilomètres au moins du lieu où les coulées rouges se produisent de temps à autre dans la mer. Lorsque le niveau des océans a baissé voici plus de 1,5 million d’années, un gisement d’eau a probablement été emprisonné, puis recouvert par le glacier Taylor en formation.
Les scientifiques pensent que des concentrations de vie semblables ont pu persister en d’autres endroits, notamment durant les épisodes dits de la Terre boule de neige, un événement hypothétique mais fortement suspecté il y a plus de 600 millions d’années, et au cours desquels la Terre aurait été entièrement recouverte de glace et de neige. Ces époques auraient vu la disparition de la grande majorité des formes de vie mais auraient aussi été le facteur déclenchant de l’évolution des premières formes de vie complexes.
Les exobiologistes s’intéressent aussi de très près à ces formes de vie atypiques, qui pourraient constituer un modèle de ce qu’on pourrait découvrir sur des mondes inhospitaliers ou très différents de la Terre, comme Mars ou les océans de glace d’Europa, un des satellites naturels de Jupiter.